L’utopie des tombeaux
أبريل 20, 2018Les funérailles
أبريل 20, 2018
Le livre
Comment ne peut-elle
Lire ce que j’écris
Comment attend-elle dernière la porte
Que quelqu’un passe
Lui donne quelques mots
Des mots curieux furieux.
Mais elle écoute et sourit
Comme si elle était avec moi, là
A cinq heures du matin,
Comme si le remue-ménage de ses mains
Déplaçait des paroles
Mal rangées
Déplaçait puis aller se coucher.
.
Mais comment ne peut-elle
Lire ce que ses mains ont tracé hier
Ouvrir le balcon
Le matin
Recevant le soleil
Un exemplaire du livre dans la main droite
Et lire tranquille
Clignant de l’œil à ses voisines
Ceci est son fils faiseur de mots
Brandir le livre sous leurs yeux
Cinq fois
Murmurer
De drôles de mots inexplicables
Le pont
Des soldats australiens, des soldats africains y ont dormi
Durant la deuxième guerre
Les africains particulièrement rugissaient toute la nuit
Ma mère les avait entendus
Et sans connaître la forêt
Elle assurait qu’ils arrivaient de là.
Des grenouilles énormes ont dormi sous le pont
Qui à leur tour privèrent de sommeil le khawaga Green
Propriétaire des manguiers touffus.
.
C’était dans les années quarante
Quand la vie était une vie
Comme tout le monde l’assure.
.
Les piétinements répétés
ont affaissé le panneau central du pont
sans faire saillir de clous
et les pieds nus le traversaient sans crainte.
Avec les pluies,
Il ressemblait à la fille du khawaga
Blanche et replète.
Avec les vents
Il était cet enfant vêtu d’une tunique à même la peau
En pleine chaleur
Et le pied de fellah
Et ses mains.
.
C’était dans les années quarante
Quand la vie était une vie.
.
Les voitures à bras étaient ses petites cousines
Qu’il berçait d’aller et de retour
Les bicyclettes n’avaient pas ce privilège
Il ne leur garantissait qu’une traversée rapide
Mais une étrange poussière le désespérait
Provenant de choses à explosion ou à vapeur, disait-on,
le désespérait tant qu’il fit tomber de lui même
Quatre pans d’un seul coup.
Les années soixante-dix ne furent pas entièrement mauvaises
elles le traversèrent parfois sur les épaules du père,
Dans les bras du frère, à la main de la mère
Quelques fois en détalant.
Une partie des manguiers était martelée de petits jets de pierre
Les cailloux n’atteignaient pas une seule mangue, il est vrai,
Mais certaines tombaient d’elles-mêmes
Et j’étais amoureux, de même, d’une fille blanche
Vivant avec sa famille
Dans l’immeuble du khawaga après son grand départ.
Mes dix ans dans les années soixante-dix
Me suffisent à avoir de ces jours
Où je me suçote les lèvres
et pour que j’interprète la vie
Quand elle était une vie
Comme tous l’assurent.
Chansons
Les avions sont allés et revenus
les soldats sont tombés de son sillage dans le champ de blé
avec leur tenue de camouflage
ils ont dormi chaque nuit
dans le bourdonnement grenu de milliers d’insectes
en attendant que commence la guerre
un seul mot, et elle commence
ensuite ils tombèrent l’un après l’autre
le blé est arrosé de napalm.
Les enfants du village voisin
bombardaient de cailloux les moineaux
brûlaient les arbres pour pisser dessus
les avions revinrent une fois
pour s’assurer de la corruption du monde
d’autres soldats sont tombés dans son sillage
la guerre a commencé comme l’avaient prévu les experts
La mort est plus douce qu’un coup de couteau dans la cire molle.
Là ton grand-père rampait sur le ventre, son côté gauche en flammes
ton autre grand-père le saisit, éteignit le feu
puis ouvrit la sortie de secours.
Les hommes sont revenus de guerre
se marièrent
les enfants boulaient autour d’eux
les enfants grandirent, ils en aimèrent certains
et tu étais toi
toi petite paysanne
la tourterelle des champs.
Dans le village du grand-père
les réverbères à gaz étaient très rares
la bouilloire bouillait
Et le thé dans les trois verres
et les lampes accrochées aux quatre coins de la maison
les hommes sortaient à l’aube
avec des haches et de longues savates
et le soir
aux pieds du grand-père
la suite de l’histoire du chevalier voilé
le grand-père qui mettait les chansons à leur vraie place
les hommes se balançaient
ils poussaient les portes de leur chambre à coucher tombaient sur leurs femmes
comme des bouteilles vides du château d’eau.
Chaque nuit le grand-père criait
et la petite les bras accrochés
grelottait de peur
tendait la main pour transpercer les ennemis de son épée.
Où est le verre de thé ?
La bataille est sur le point de finir
les moissons doivent commencer quelques jours plus tard.
Le chevalier voilé a lancé une corde sur le filet
et bondi très haut tenant la princesse dans ses bras, les langues de feu
longues dans la bouche du Dragon tandis que la lance se tord dans son cœur.
La couronne sur la tête de la princesse
et le chevalier sans voile
les citadelles blanches véhicules célestes
pour les jeunes fiancés.
De longs jours et des nuits plus longues
avec le grand chanteur tzigane
aux accents les plus aigus
sur l’étendue de sa voix
je répétai et la mélodie tout à fait mortelle : tu es partie.
Si tu étais loin dans la rue de l’Indépendance
tu marches avec des étrangers
tu étends les pieds sur le mur de la terrasse
une cigarette de cigarettes
tu aperçois au loin les montagnes verdoyantes
et tu rêves de cinq jours sur une de ces cimes
et sous les grands arbres
Tu vides ton sac à main
à bout de bras
les boîtes de maquillage volent
le passeport
des papiers froissés presque défaits
écrits par on ne sait qui
et tu te souviens de ses yeux avec peine et ennui.
Je te voulais ainsi lointaine
mais les deux cornes du taureau qui m’ont poussé
à la suite de mon agitation frénétique
m’ont sans cesse mis la tête au mur
même après s’être cassé
je ne trouve pas de rue assez large
pour y marcher avec des étrangers.
Devant la fontaine sur la grand-place
je trempe les chaussures et les chaussettes dans l’eau
et je marche et le froid et la poussière me mangent
je fais cela des jours durant
je puis ni mes pieds de marcher sans toi.
Je ne veux pas davantage de distractions
car une balançoire ne sert à rien
du moment que tu t’en es éclipsé doucement par le bout.
Et penses-tu que nous ayons besoin de nouveaux jeux ?
Une bicyclette de pédales
pour qu’un seul sorte vainqueur ?
Une charrette franchit 50 m carrés
sans heurter les autres Charrettes ?
Et quoi ?
Nous laissons un peu la lumière
nous nous excusons de notre échec perpétuel à jouer
nous laissons à nos nez le soin de faire couler leur eau
nous enregistrons le bruit de nos entrailles sur une bande souvenir
nous la rangeons entre el Camaron et omn kalthum
et nous continuons à chercher des décharges nouvelles d’électricité
qui prolongent nos frissons pour la semaine
ensuite tout s’arrête
s’arrête pour ne pas toujours recommencer.
Traduit par Catherine Farhi